28 octobre : Fête de la dédicace de La Chapelle de Notre Dame de Laghet …

Lectures : 1 R 8, 22-23,27-30 ; Jn 4,19-24

Par Père Roger Hébert

 

Elle est belle cette prière de Salomon au jour de la consécration du Temple. Elle nous aide à réaliser ce qu’il y a d’inouï dans ce fait que Dieu puisse habiter une construction réalisée par les hommes, écoutons à nouveau l’étonnement de Salomon : Est-ce que, vraiment, Dieu habiterait sur la terre ? Les cieux et les hauteurs des cieux ne peuvent te contenir : encore moins cette Maison que j’ai bâtie ! Oui, c’est vraiment inouï que Dieu accepte d’être comme « assigné à résidence » dans nos églises. Comme le dit si justement Salomon, le ciel et la terre ne peuvent le contenir et il est là, présent par mi nous. Bienheureuse fête de la dédicace de cette chapelle de Laghet qui nous permet de nous déshabituer… Parce que nous sommes trop habitués ! Nous voulons rencontrer le Seigneur, nous venons ici et ça nous semble normal que le Seigneur soit là à nous attendre !

Mais disons-le clairement, ça n’a pas été simple pour Dieu d’accepter de demeurer entre 4 murs. Oh pas parce que Dieu aurait la folie des grandeurs et qu’il aurait estimé qu’aucune demeure serait digne de lui, non, ce n’est pas ça ! Mais vous connaissez peut-être cet épisode où le roi David va trouver le prophète Nathan. Car c’est David qui a eu l’idée de construire un Temple, mais c’est Salomon, son fils qui réalisera le projet. David va donc trouver le prophète Nathan pour lui dire : je viens de réaliser que je suis en-dessous de tout ! Moi, le roi, j’habite dans un palais somptueux et Dieu, lui, est toujours sur la tente comme lorsque nous traversions le désert. Nathan est touché par la proposition de David et lui dit, un peu vite, fais comme tu l’as dit, le Seigneur bénira ton projet. Mais, dans la nuit, Dieu convoque Nathan pour lui dire : je ne suis pas du tout d’accord avec cette idée de me construire un Temple ! Le problème, c’est que le texte ne dit pas clairement pourquoi Dieu n’est pas d’accord ! Alors, comme c’est un texte que j’aime bien, j’ai cherché, j’ai imaginé et j’en suis arrivé à la conclusion suivante : En fait, Dieu préférait le camping !

Au-delà de la formule humoristique, il y a une grande vérité derrière ces mots. Dieu avait flairé un piège. Au cours de la traversée du désert, Dieu habitait au milieu de son peuple, dans une tente, comme tout le monde et cette tente portait un beau nom : tente de la rencontre. Il était toujours au milieu de son peuple. Là, il comprend que, malgré cette idée généreuse, il pourrait bien y perdre au change ! Oh, il ne se fait pas de souci sur le caractère somptueux de la maison que les hommes lui construiront, peut-être que ça le gêne un peu d’ailleurs ! Ce qui le dérange le plus, c’est qu’il y a un risque : quand les hommes voudront le rencontrer, ils viendront le rencontrer là où ils l’ont assigné à résidence et, le reste du temps, ça sera chacun chez soi ! Ce que Dieu aimait dans le camping, c’était la proximité, il était au milieu de son peuple et ça, ça lui plaisait par-dessus tout.

Finalement, Dieu va céder et il acceptera le projet en espérant que les hommes auront compris et que le Temple qu’ils lui bâtiront ne ressemblera pas à une prison dorée ! Et comme toujours, quand Dieu s’engage, il ne le fait pas à moitié, nous l’avons entendu dans la 1° lecture, il a pris cet engagement formel : C’est ici que sera mon nom ! Certes, il y a bien le risque que j’évoquais, mais, sans doute que Dieu a compris que les hommes avaient besoin de signes concrets. Le fait qu’ils lui construisent une maison ne signifie pas qu’ils ne veulent plus qu’il habite au milieu d’eux dans la simplicité et la proximité mais ils ont besoin d’un lieu dans lequel ils soient sûrs de pouvoir le trouver, un lieu un peu à l’écart, un lieu de silence qui conduit à faire monter des prières ferventes. Dieu s’est engagé : Oui, c’est bien ici que sera mon nom. Et il répondra à la prière de Salomon qui lui demande : Que tes yeux soient ouverts nuit et jour sur cette Maison. Et Dieu ne prendra aucun repos, de jour comme de nuit, il sera dans ce lieu pour écouter les prières qui montent vers lui et prodiguer ses grâces.

Evidemment, tout ce que je viens de dire à propos du Temple, nous pouvons le transcrire à propos de nos églises et de nos chapelles. Avec les mêmes risques et les mêmes chances !

Certains jours, nous pourrions penser que c’est bien pratique de savoir où rencontrer le Seigneur, ce qui nous permet de vivre de bons moments en sa présence, mais d’autres jours, nous pourrions aussi être contents de savoir que le Seigneur est là-bas, dans la chapelle et que, moi, chez moi, dans ma maison, dans mon cœur, je fais ce que je veux, il est le patron chez lui et moi, je suis le patron chez moi ! Ce n’est pas pour rien que les grands spirituels nous ont enseigné la prière du cœur qui peut se vivre de bien des manières, l’essentiel étant de chercher à ne pas perdre la présence, le contact avec le Seigneur même quand je ne suis pas à la chapelle, même quand je suis immergé dans mes occupations quotidiennes.

C’est ce chemin de la prière du cœur que Jésus a voulu ouvrir pour la samaritaine. Elle, avec les samaritains, elle pensait que c’était sur le Mont Garizim que le Seigneur se donnait à rencontrer alors que les juifs, fiers de leur temple, disaient que c’était à Jérusalem. Comme elle tient un expert, elle en profite pour lui poser la question : qui a raison ? Jésus ne tranche pas, il trouve tellement incongru que les hommes puissent se battre pour affirmer que Dieu est là et qu’il ne peut pas être ailleurs, que Dieu est avec eux et qu’il ne peut pas être avec les autres ! Jésus ouvre le chemin de la prière du cœur pour cette femme en lui disant que les vrais adorateurs de Dieu sont ceux qui l’adorent en esprit et en vérité.

Nous qui avons la chance d’avoir cette chapelle habitée par la présence du Seigneur, profitons de cette chance. Le curé d’Ars, mon compatriote, aimait répéter en montrant le tabernacle : il est là ! Alors, profitons de sa présence pour vivre avec lui des moments de grande intimité. La Vierge Marie, Notre Dame de Laghet et qui est comme la maitresse de maison de ce sanctuaire n’a qu’un seul désir, c’est que nous soyons conduits à rencontrer son Fils Jésus. Et que nos rencontres avec Jésus, ici, dans ce lieu béni, nous aident à ouvrir grand la porte de notre coeur puisque c’est dans nos cœurs que le Seigneur souhaite établir sa demeure pour être toujours avec nous. Par l’intercession de Notre Dame de Laghet, demandons cette grâce de ne plus jamais penser que ce qui est bien, c’est quand chacun est chez lui et maitre chez lui : le Seigneur maitre dans sa chapelle et nous, maitres dans nos cœurs !