« La lumière brille dans les ténèbres,
et les ténèbres ne l’ont pas arrêtée ».
St Jean 1, 1-14
« La lumière brille dans les ténèbres,
et les ténèbres ne l’ont pas arrêtée ».
St Jean 1, 1-14
Novembre évoque pour l’Eglise la fête de tous les saints, ceux qui aux premiers siècles moururent en martyrs, ceux que nous prions durant l’année liturgique, ceux avec lesquels nous avons un lien particulier, notre saint patron, saints de notre famille, ceux qui nous ont « montré la route du ciel », à l’exemple du saint Curé d’Ars, saints qui nous inspirent par leur charisme, saints de l’oraison et de la vie intérieure en solitude, saints modèles de charité et de simplicité du coeur. Après la Toussaint, vient le temps du recueillement, de l’eucharistie offerte pour les défunts, de la prière devant la sépulture pour ceux qui se sont endormis dans l’Espérance de la résurrection des morts…
A contre temps de l’esprit du monde
A contre temps de l’esprit du monde gagné ici et là par la noirceur des « halloweeneries » pour le chrétien le mois de novembre résonne comme un prélude à la joie. Avec la fête de la Présentation de la Vierge Marie au temple, jour dédié à la vie consacrée. Cette fête « tire son origine de deux évangiles apocryphes dans lesquels il est rapporté que Marie fut présentée par Anne et Joachim au Temple de Jérusalem à l’âge de trois ans, elle y vécut avec d’autres jeunes filles et les saintes femmes qui les dirigeaient » (1). Joie mariale en la fête de l’Immaculée Conception où Marie apparaît comme le porte-étendard de la virginité du corps et de la pureté de l’âme. Souvenons-nous des paroles de Marie lorsque l’ange lui annonça qu’elle serait « la Mère du Seigneur » (2) :
« Comment cela se fera-t-il je ne connais point d’homme ? ».

Nous voici parvenus à la veille de la Nativité
Cette parole de Marie en forme d’interrogation, vient conclure pour nous le cycle de l’année 2023 qui avait pour thème les « Paroles de la Vierge Marie illustrées par les ex-voto de Laghet ». Suite à la visite de l’Ange et à l’obéissance parfaite de Marie à la volonté de Dieu, nous voici parvenus à la veille de la Nativité sujet de l’ex-voto de ce jour. Une composition très sobre, en clair-obscur qui évoque la pastorale de Noël qui se dit Calena dans le Comté de Nice. Souvenons-nous que ce furent les bergers de Judée qui reçurent les premiers l’annonce par l’Ange de la naissance de Jésus et vinrent à Bethléem lui rendre hommage. De nos jours villes et villages s’animent encore de crèches vivantes et de foires avec des stands où s’alignent les santons colorés qui viendront garnir la crèche familiale. Lucéram, village médiéval des Alpes-Maritimes, est devenu célèbre pour sa Pastorale des bergers grâce aux générations de Lucéramencs qui ont su maintenir vivante une tradition séculaire qui se déroule une fois l’an lors de la Messe de Minuit (3). La voici. A la nuit tombée, les habitants du village sortent de chez eux, empruntent les ruelles sombres et tortueuses en s’éclairant avec des torches ou des bougies et convergent en silence vers l’église Sainte Marguerite (4) dont les cloches sonnent à toute volée. En tête du cortège les éleveurs, vêtus de houppelandes, portent chacun un agneau enrubanné. Arrivés sur le parvis de l’église, le meneur, Lou Pastre Mage (5) s’avance et frappe trois coups avec son bâton sur un des vantaux de la lourde porte. Aussitôt monsieur le Curé apparaît sur le seuil et, dans un geste solennel, ouvre les portes et laisse entrer grands et petits qui entonnent joyeusement :
« Il est né le divin enfant »
C’est avec joie et émotion que nous partageons cette heureuse découverte
Chacun ayant trouvé sa place, la célébration commence dans un respectueux silence interrompu ici ou là par quelque bêlement d’agneau… ce qui ravit les enfants… et les plus grands ! Les lectures se succèdent puis, au moment de l’oufferta (6) le curé s’avance sur l’estrade et présente une effigie de L’Enfant Jésus que chacun peut venir embrasser. Et d’abord les bergers qui, comme le montre l’ex-voto, s’avancent parfois en couple. Après l’hommage au divin enfant chaque berger soulève fièrement son agneau en direction de l’autel en guise d’offrande… fruit de son travail et du don de la création. Une action de grâces qu’un couple a choisi d’exprimer à travers le dépôt de cet ex-voto au Sanctuaire de Laghet. Accrochée sous le porche, non loin de l’accès à la chapelle de Notre-Dame des Grâces cette peinture à l’huile, de 46×38 cm, a été recensée par la DRAC en 2003. Malgré la dédicace brodée au fil rouge sur le bandeau : « AVEC MES REMERCIEMENTS », le tableau n’est ni daté, ni signé. Il faut dire que cette image et quelques autres nous interrogent depuis le début de nos recherches sur le patrimoine votif de Laghet il y a une vingtaine d’années. Un vrai questionnement pour un tableau dont on notera l’absence de représentation de la Vierge de Laghet. Le mystère est resté entier jusqu’à il y a peu… Par le plus grand des hasards nous avons découvert il y a quelques mois, une photographie venue éclairer la genèse de cet ex-voto. Il s’agit d’un cliché en Noir et Blanc montrant une scène de l’oufferta, se déroulant ici-même, dans l’auguste chapelle du Sanctuaire de Laghet ! La photo, datée de Noël 1936, appartient à GETTY Images qui la commercialise avec ce commentaire : « Fidèle embrassant les pieds d’une représentation de Jésus-Christ, lors de la Messe de Noël au sanctuaire Notre-Dame de Laghet, le 25 décembre 1936, à La Trinité dans les Alpes-Maritimes, France (7).
Chers Amis, tout est don ! C’est avec joie et émotion que nous partageons cette heureuse découverte avec vous habitués de cette rubrique.


« Cherchons les réalités d’en haut »
Revenons un instant à l’ex-voto de ce jour. L’acceptation, sans détour, par Marie de la volonté de Dieu a ouvert les portes à l’Incarnation de Dieu fait Homme, à l’entrée de Jésus lumière du monde, incarné, mort, descendu aux enfers et ressuscité pour notre salut ! Alors, en ces temps troublés qui sont les nôtres, que cette douce lumière de Noël qui brille dans la nuit de l’ex-voto, nous invite à la confiance, nous aide à accueillir le don de Dieu dans notre vie car, comme l’Ange l’a affirmé à Marie, « Rien n’est impossible à Dieu ! ».
A l’intercession de la Vierge Marie, notre Mère, qu’en cette nuit de Noël 2023, le Seigneur visite la terre, celle de nos peines, doutes, interrogations, révoltes intérieures, nos fausses sécurités, notre individualisme et nos manques d’amour. Demandons à être libérés des habitudes fâcheuses, de l’addiction aux écrans qui assèche notre vie intérieure, aux réseaux sociaux susceptibles de nuire à la santé mentale et physique, de la haine qui défigure les créatures et abime la Création. « Cherchons les réalités d’en haut » (8).
Dans ce monde qui a perdu tout repère, trouvons refuge auprès de Notre-Dame de Laghet, prions pour ceux qui vivent ce temps, en particulier les jeunes ; prions pour que l’esprit de sagesse inspire les dirigeants, qu’ils renoncent aux logiques meurtrières ; nous- mêmes renonçons à « l’esprit du monde », comme nous le rappelait notre recteur le père Roger Hébert, dans son homélie du 22 octobre dernier (9) et en particulier sa lecture très éclairante de la fameuse formule : « Rendons à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu », car cette Parole de Jésus, ne sépare pas les choses, tout au contraire elle invite à rendre les choses à celui à qui elles appartiennent. La monnaie à l’effigie de César revient à César, mais chaque être humain créé unique et « à l’image de Dieu », appartient à Dieu. Autrement dit la totalité de nos actes, de nos choix, de nos inclinations devraient porter l’empreinte divine. C’est ce que les spirituels appellent « être unifié ». Au prétoire Jésus l’affirme avec force devant Pilate, « Ma royauté n’est pas de ce monde… » (10). Alors, appuyons-nous avec confiance, sur les paroles de Jésus, Bon Berger et Agneau immolé, et marchons à sa suite, pauvres, libres et heureux… vers la vie éternelle !
« Moi, je suis la lumière du monde.
Celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres, il aura la lumière de la vie »
(Jean 8,12)
Commentaire : Patrizia COLLETTA, « Médiation, Art & Foi »
Notes : (1) Fondation Catholique Sel et Lumière Media, slmedia.org ; (2) On peut relire Luc 1, 26-37. En 431, le Concile oecuménique d’Ephèse a déclaré solennellement Marie, « Mère de Dieu ». C’est le titre que les Eglises d’Orient et d’Occident, unanimes, donnent à Marie quand elles en font mémoire dans la Prière Eucharistique, dans les célébrations de la Nativité et, comme à Laghet, lorsqu’elles s’adressent à Elle en faisant appel à son intercession ; (3) L’INA éclaire l’actu, « Noël à Lucéram – 1981, vidéo de 05 : 03’, Florence Dartois, Publié le 17.12.2021 mis à jour 2022. A visionner sur ina.fr ; Pastorale des bergers et messe de minuit sur : maisondepaysdeluceram.fr ; (4) Eglise inaugurée en juillet 1525, décor stuqué Baroque et clocher à bulbe au XVIIIè, édifice classé Monument Historique en 1983 ; (5) Lou Pastre Mage, la tradition désigne par ce nom le chef des bergers par ancienneté et expérience ; (6) l’oufferta = l’offertoire : ensemble de rites et invocations qui accompagnent la bénédiction du pain et du vin ; (7) Photo gettyimages, Photo by KEYSTONE-FRANCE/Gamma-Rapho via Getty Images ; (8) Lettre de Saint Paul Apôtre aux Colossiens 3, 1-2 ; (9) Mathieu 22, 15 -21, on pourra lire avec profit l’homélie du père Roger Hébert du 22 octobre 2023 intitulée « Quand Jésus piège les piégeurs pour les faire grandir » sur sanctuaire-laghet.fr, onglet « Prier » puis « Homélies » ; (10) Voir Jean 18, 36