Les Noces de Cana

Nous poursuivons notre voyage avec les paroles de la Vierge Marie et un ex-voto unique en son genre à Laghet.

Nous voici dans l’intimité chaleureuse d’une chambre au mobilier style XIXè, avec son lit d’enfant en fonte, typique de l’époque. La composition est traversée en diagonale par des rayons lumineux qui descendent depuis une nuée sur une jeune mère et son enfant. Au centre du halo de lumière, un peu effacée par le temps, on devine l’effigie de Notre-Dame de Laghet avec l’Enfant Jésus. Nous ne savons rien sur les circonstances du don de cette peinture à l’huile restée anonyme. Toutefois, cette scène émouvante évoque le rôle prépondérant des parents et en particulier des mères dans l’éveil des enfants à la foi… Comment ne pas rapprocher cette sollicitude maternelle et spirituelle avec l’enfance de Jésus à Nazareth et… plus tard avec la scène des Noces de Cana relatée dans l’Evangile de Jean :

« Comme le vin manquait, la Mère de Jésus lui dit : Ils n’ont pas de vin. Mais Jésus lui répondit : Femme, que me veux-tu ? Mon heure n’est pas encore venue. Sa Mère dit aux serviteurs : Quoiqu’Il vous dise, faites-le » (Jean 2, 3-5).

Paroles surprenantes de la part de Marie, habituellement si discrète, alors qu’elle-même, Jésus et les disciples étaient invités à la noce. La tradition religieuse juive voulait que lors du seoudat de noces le maître du repas veille sur les rites et les exigences de la cacheroute (1). Ce jour-là, vers la fin du repas, le vin manqua. A la surprise générale, Marie en fait la remarque à son Fils. Après une brève hésitation, Jésus ordonne aux serviteurs de remplir les six jarres vides avec de l’eau». Tous se réjouirent de la qualité de ce très bon vin avec le reproche, à peine déguisé, d’avoir gardé le meilleur cru pour la fin. Le nectar miraculeux aida les convives à danser et à prononcer les 7 bénédictions rituelles sur les époux dans la liesse générale et les chants de joie ! Cette union d’un homme et d’une femme n’évoque-t-elle pas le Premier commandement ? (2). L’Alliance entre Dieu et les hommes ? Alliance Nouvelle et éternelle à laquelle tout baptisé est appelé. Alliance vécue, comme dans le mariage, dans sa dimension sacrée, corps, âme et esprit ?

L’Evangile de Jean, rédigé aux environs de l’an 90, donne à l’épisode de Cana toute sa dimension eschatologique : « Tel fut à Cana de Galilée, le commencement des signes de Jésus. Il manifesta sa gloire et ses disciples crurent en lui ». A travers son témoignage l’Apôtre montre combien les rôles ne sont plus distribués par la Providence divine dont Marie se fait l’écho. Le miracle de l’eau changée en vin à Cana préfigurant, en quelque sorte, le mystère de la « transsubstantiation » des saintes espèces durant la messe (3). On note également que, d’une certaine manière, Marie anticipe l’avènement de la Croix au pied de laquelle Jésus lui confiera l’Eglise. Le miracle des Noces de Cana fut le premier des nombreux miracles qui ponctuèrent la prédication itinérante de Jésus sur les routes de Galilée et sa suite la vie de ses disciples de tous les temps. Les ex-voto de Laghet témoignent, à leur manière, de l’intercession de la Vierge Marie et de la Présence de Celui qui fait route avec l’homme…

Notons toutefois que Marie, à Cana, se tient sur le seuil d’une réalité indicible…tout comme cette jeune mère qui montre la voie de l’intimité avec Dieu, sans préjuger de ce que son enfant en fera. Qu’en est-il pour nous ? Qu’avons-nous fait des graines de foi reçues dans notre enfance ? « Ils n’ont pas de vin » ! Ces paroles de la Vierge Marie pourraient nous interpeller sur notre tristesse actuelle, notre manque, la durée d’une épreuve, d’une maladie, une difficulté particulière… Alors tournons-nous vers Marie, prions-la avec le cœur. Par son intercession maternelle que le Seigneur augmente en nous la foi. Demander et croire, comme disait Saint Thérèse de l’Enfant Jésus, « Qu’on obtient de Dieu autant qu’on en espère » !

En ce mois de Mai, que la tradition de l’Eglise consacre à la Vierge Marie, déposons auprès de Notre-Dame de Laghet nos intentions de prière. Venons prier le chapelet dans la chapelle (4), et, loin de l’agitation du monde, demandons avec une confiance innocente, la PAIX et la JOIE « que nul ne pourra nous ravir » ! (Jean 16,22)

« J’encourage, avant tout, à faire des demandes, des prières, des intercessions et des actions de grâce pour tous les hommes, pour les chefs d’Etat et tous ceux qui exercent l’autorité, afin que nous puissions mener notre vie dans la tranquillité et le calme, en toute piété et dignité. Cette prière est bonne et agréable à Dieu notre Sauveur, car Il veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la pleine connaissance de la vérité ».
Lettre de Saint Paul Apôtre à Timothée 2, 1-4

Commentaire : Patrizia COLLETTA, « Médiation, Art & Foi »
Note (1) Consistoire de Paris : « Cacheroute »: ensemble des règles alimentaires dont la source se trouve dans la Torah ; (2) « Jésus répondit : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit », Mathieu 22, 37 ; (3) Note et Photo d’illustration, in vaticannews.ca, « Transsubstantiation » : dogme fondamental de la foi catholique, proclamé par l’Eglise lors du 4ème Concile du Latran en 1215, qui reconnait la conversion du pain et du vin en corps et sang du Christ lors de la « consécration » durant la célébration eucharistique. Pour les chrétiens catholiques et orthodoxes les « saintes espèces », une fois consacrées, signent la présence réelle du Christ ; (4) Chapelle de Laghet, Chapelet en semaine à 17 heures sauf le lundi.