Quel contraste entre la parole que Jésus, ressuscité adresse à ses apôtres et leur réaction. Jésus leur dit : la Paix soit avec vous et le texte nous rapporte que les apôtres étaient saisis de frayeur et de crainte. Comment expliquer ce contraste ?

Il y a une 1° raison qu’on peut facilement comprendre et qui est mentionnée dans le texte : ils croyaient voir un esprit. Oui, mettons-nous un instant à leur place. Les apôtres ont tous, ou presque tous, abandonné Jésus. Jean qui est resté au Golgotha leur a raconté comment ça s’est terminé, les souffrances de Jésus et sa mort sur la croix, le corps de Jésus descendu de la croix et remis entre les bras de Marie, puis Joseph d’Arimathie qui l’emmène vite dans un tombeau avant que le sabbat ne commence. Pour eux, Jésus devrait donc se trouver dans un tombeau. Il y a bien eu des femmes qui, au petit matin du dimanche sont allés au tombeau et l’ont trouvé vide … enfin pas totalement vide puisque 2 hommes en habits éblouissants ont dit que Jésus n’était plus là puisqu’il était ressuscité. Les femmes étaient vite aller l’annoncer aux apôtres qui, selon le texte d’Evangile, avaient considéré ces propos comme délirants ! Là, il y avait bien deux du groupe des 70 disciples, qui essayaient de leur expliquer que Jésus avait marché avec eux et, voilà que Jésus arrive au milieu d’eux, St Jean précise même qu’il les rejoint alors que les portes étaient fermées. On peut comprendre qu’ils soient saisis de frayeur et de crainte, croyant voir un esprit.

Mais voyez-vous, je suis à peu près sûr qu’il y a une 2° raison pour expliquer qu’ils soient saisis de frayeur et de crainte. Cette raison, elle n’est pas mentionnée dans l’Evangile, mais je ne peux pas m’empêcher d’y penser. Je suis à peu près sûr qu’ils étaient ravagés par la culpabilité. Je l’ai dit, ils l’avaient tous, ou presque tous, abandonné, ils ne pouvaient pas ne pas y repenser, se dire qu’ils avaient été lamentables. Et quand Jean leur a raconté les derniers moments de Jésus, toutes ses souffrances, ça a dû renforcer encore leur culpabilité réalisant que leur présence aurait pu être un soutien pour Jésus. Alors depuis vendredi, ils se repassaient en boucle, dans leur tête, le fil des événements et, à chaque fois, c’était une couche de culpabilité qui se rajoutait. Et voilà que Jésus se tient là, au milieu d’eux ! Oui, ils ont un peu de mal à y croire et se demandent si c’est vraiment possible, mais sa présence ne peut que réactiver leur culpabilité. D’autant plus que, dans l’Evangile de Luc, c’est la 1° rencontre de Jésus ressuscité avec ses apôtres.

Rappelons-nous, quand nous étions enfants et que nous faisions des bêtises en l’absence de nos parents, quand ils rentraient, même s’ils disaient sur le pas de porte : alors mes chéris, ça s’est bien passé, nous, nous n’étions pas fiers de les voir arriver parce que nous nous demandions comment ça allait se passer ! Je crois que ce petit exemple naïf peut nous aider à comprendre dans quel état d’esprit étaient les apôtres en voyant arriver Jésus. Et je crois que Jésus l’a bien compris, c’est pour cela qu’il prononce une parole et pose un geste.

  • La parole, c’est : la paix soit avec vous ! S’il leur dit cela, c’est bien parce qu’il a perçu que leurs cœurs n’étaient pas du tout dans la paix ! Belle parole de Jésus qui est déjà une parole de miséricorde. Jésus ne leur dit pas : alors, les gars, vous êtes fiers de vous ? Il ne leur dit pas non plus : les gars, il faudrait vraiment qu’on parle parce que j’ai 2 mots à vous dire sur votre attitude ! Non, rien de tout cela, les premiers mots qui sortent de sa bouche venant directement de son cœur : la paix soit avec vous !
  • Et, après avoir prononcé cette parole, il va poser un geste : Voyez mes mains et mes pieds. C’est le même geste que, dimanche dernier, Jésus avait posé pour Thomas qui n’arrivait pas à croire. Et, dimanche dernier, j’expliquais qu’en montrant ses mains, ses pieds et son côté, Jésus montrait, certes, les marques de ses souffrances, mais désormais les stigmates des clous plantés dans sa chair et de la lance traversant son côté seront les plus belles preuves de son amour pour nous. Tout cela, il l’a vécu dans l’amour pour sauver tous les hommes, ceux qui l’avaient condamné, ceux qui l’avaient fait mourir, ses apôtres qui l’avaient abandonné et nous qui le trahissons si souvent.

Pour Jésus, prononcer cette parole et poser ce geste, c’est donc une manière de dire à ses apôtres : arrêtez de gamberger, j’ai tout pardonné, je suis tellement heureux de vous retrouver ! Il a dû prononcer cette parole avec une telle intonation dans la voix et poser ce geste avec tellement d’amour que les apôtres ont perçu que la joie de Jésus n’était pas une joie qui était feinte. Du coup, ils se mettent au diapason de la joie de Jésus, le texte nous disait : Dans leur joie, ils n’osaient pas encore y croire ! Mais ce n’est pas tout, Jésus va leur demander à manger. Honnêtement, je ne suis pas sûr que Jésus, avec son corps de ressuscité, ait eu besoin de manger. Mais il avait dû sentir l’odeur du poisson grillé, une odeur qui lui avait rappelé tous les bons souvenirs de ces barbecues improvisés partagés avec ses apôtres sur la plage du lac. En mangeant ce poisson grillé au milieu d’eux, ce sont ces souvenirs-là qu’il veut raviver dans la mémoire de leur cœur et il voudrait que ces souvenirs puissent effacer les souvenirs si douloureux des événements récents qui génèrent tant de culpabilité en eux. C’est donc une véritable guérison spirituelle que Jésus veut opérer dans le cœur de ses apôtres. Et pour ne pas en rester juste au niveau des émotions, Jésus va entreprendre une catéchèse fondamentale pour ses apôtres afin qu’ils puissent vraiment comprendre le sens de tout ce qui s’est passé.

Et la toute dernière parole est merveilleuse : À vous d’en être les témoins ! Finalement, c’est la mission qui finira de les guérir. Oui, ils se sont montrés lamentables, mais Jésus les avait choisis et il confirme son choix comme en leur disant : désormais vous savez ce que vous valez quand vous ne comptez que sur vous, alors comptez plutôt sur moi et ne braquez jamais les projecteurs sur vous qui êtes des pauvres mais sur l’Evangile que vous annoncez qui, lui, est puissant !

Par l’intercession de Notre Dame de Laghet, demandons la grâce d’accueillir cette paix que Jésus veut nous offrir dans cette Eucharistie et que cette paix vienne nous guérir, nous restaurer.