19 avril : veillée pascale : le Baptême nous fait revivre ce que Jésus a vécu.

Par Père Roger Hébert

Cette nuit, en France, comme je le disais avant que nous n’allumions le feu, beaucoup d’adultes vont être baptisés auxquels, il faut rajouter des adolescents. Je suis allé vérifier les chiffres, en fait, c’est 10.400 adultes et 7.400 adolescents 45% de plus que l’année dernière. Ici, à Laghet, nous allons avoir la joie de donner le Baptême à 4 d’entre eux et ici, c’est 100% d’augmentation puisqu’il n’y en avait pas l’année dernière !  Evidemment, il ne s’agit pas pour l’Eglise de crier victoire en pensant que les problèmes sont derrière nous. Mais nous voulons dire notre joie en constatant que la puissance d’amour du Seigneur est toujours capable de tourner des cœurs vers Lui. Oui, car c’est bien lui qui est derrière tout ça.

La plupart des catéchumènes sont venus frapper à la porte de l’Eglise en empruntant des chemins qui nous étonnent ! C’est comme si le Seigneur nous disait : vous vous démenez pour essayer de témoigner de votre foi et attirer à l’Eglise et vos efforts me font chaud au cœur, mais reconnaissez quand même que c’est moi qui travaille le plus, c’est moi qui suis allé chercher la plupart de ces catéchumènes et qui les ai conduits à vous. Oui, Seigneur, c’est bien à toi que nous devons ce regain d’enthousiasme pour la foi, nous en sommes émerveillés et nous volons te dire merci.

Mais nous sentons aussi notre responsabilité, tu as conduit ces 17.800 catéchumène à frapper à la porte de ton Eglise, ils ont été accueillis, plus ou moins bien selon les circonstances, ils ont été accompagnés, là encore, plus ou moins bien et maintenant tu mes confies à nos assemblées en nous demandant : saurez-vous les accueillir ? Saurez-vous leur faire une place ? Saurez-vous continuer à les accompagner car ils sont encore des bébés dans la foi à qui on ne peut pas dire : on vous a beaucoup donné, maintenant, débrouillez-vous ! Que ton Esprit-Saint guide tous les chrétiens, baptisés de longue date pour qu’ils se montrent vraiment fraternels à l’égard de ces catéchumènes qui deviendront des néophytes après leur baptême et qui sont si précieux pour toi !

Mais au fait, vous êtes-vous demandé pourquoi les catéchumènes étaient baptisés la nuit de Pâques. Après tout cette date n’est pas forcément la plus pratique et l’heure encore moins ! Oui, mais pour l’Eglise, il ne pouvait pas y avoir de meilleure date que celle de la veillée pascale. Et c’est la lecture de St Paul que nous avons entendue qui nous en donne la raison. Si vous avez eu un moment d’inattention, je vous relis les premiers versets : nous tous qui par le baptême avons été unis au Christ Jésus, c’est à sa mort que nous avons été unis par le baptême. Si donc, par le baptême qui nous unit à sa mort, nous avons été mis au tombeau avec lui, c’est pour que nous menions une vie nouvelle, nous aussi, comme le Christ qui, par la toute-puissance du Père, est ressuscité d’entre les morts. Pour faire simple et en résumé, le baptême nous fait faire le passage qu’a fait Jésus et que nous célébrons en cette nuit, passage de la mort vers la Vie.

Si jamais tout cela vous semble bien intello et difficile à comprendre, je voudrais vous raconter rapidement comment étaient célébrés les baptêmes dans les premiers siècles car la liturgie déployée permettait de tout comprendre. Dans les premiers siècles, on ne baptisait pas en versant de l’eau comme je le ferai dans un instant, on baptisait par immersion, c’est-à-dire en plongeant le catéchumène entièrement dans l’eau ; c’est d’ailleurs le sens du mot baptême qui vient d’un mot grec signifiant « plongée ». Certaines paroisses font à nouveau des baptêmes par immersion, mais c’est un peu compliqué et puis, on ne peut pas reprendre tout le symbolisme vous allez comprendre pourquoi.

Les baptistères étaient donc des mini-piscines qui se trouvaient des les grandes églises, cathédrales et basiliques. Mais ces piscines aveint une forme particulière, elles étaient en forme de croix. L’évêque ou le prêtre qui allait baptiser attendait le catéchumène dans une branche latérale de la croix. Le catéchumène descendait dans la piscine par des marches d’escalier qui avaient été aménagées et avant de descendre, il quittait ses vieux vêtements, ne gardant qu’un pagne. Arrivé vers l’évêque ou le prêtre, celui-ci trempait le catéchumène en lui versant de l’eau sur la tête, mais plus souvent en lui mettant par 3 fois la tête sous l’eau en disant je te baptise au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Une fois baptisé le catéchumène ressortait de la piscine du côté opposé de son entrée et on le revêtait d’un vêtement blanc.

J’ai oublié de dire que les piscines en forme de croix étaient étroites, ce qui ne permettait pas aux catéchumènes d’entrer les bras le long du corps, il fallait lever les bras et, ainsi le catéchumène ressemblait au crucifié. Je pense que vous avez tout compris du symbolisme, c’était clair, le baptême unissait à la mort du Christ, visait à faire mourir, à noyer ce que Paul appelle le vieil homme pour entrer dans la vie nouvelle, pour que la victoire du ressuscité éclate dans la vie de celui ou celle qui venait d’être baptisé. Vous comprenez donc pourquoi les baptêmes d’adultes et de jeunes se célèbrent au cours de la veillée pascale, il se passe dans le baptême ce qui s’est passé pour le christ en cette nuit, c’est ce qui va se passer pour vous, chers catéchumènes, même si nous ne déployons pas tout ce scénario et je le dis avec autant de force, c’est ce qui s’est passé pour nous tous les chrétiens baptisés de plus ou moins longue date, selon nos âges, et nos itinéraires.

Vous avez entendu : le baptême noie le vieil homme pour que la puissance de vie du Christ ressuscité puisse nous envahir et nous transformer en témoins. C’est d’ailleurs pour cela que les catéchumènes recevront aussi le sacrement de confirmation à la suite de leur baptême afin qu’ils soient fortifiés par l’Esprit-Saint qui fera d’eux d’ardents disciples-missionnaires. Le vieil homme sera noyé par le baptême, il a été noyé au jour de notre baptême, c’est une certitude de foi. Mais alors, me direz-vous, pourquoi nous retombons encore si souvent dans certains péchés ? Luther a donné une bonne réponse, pleine d’humour ; il a dit : le vieil homme a été noyé, mais il savait nager le bougre et c’est pour cela qu’il nous rattrape régulièrement. L’image est belle car ça signifie qu’il ne peut nous rattraper que lorsque nous nous arrêtons, lorsque nous faiblissons, lorsque nous ne demandons plus assez souvent la force du Saint-Esprit pour que la victoire du Christ irrigue tous nos comportements. Le Baptême demande donc à être sans cesse vivifié par une vie de prière fidèle, par la fréquentation des sacrements, par la lecture des Ecritures et par le soutien d’une communauté. C’est lorsque nous nous éloignons de ces piliers fondamentaux que le vieil homme nous rattrape.

Merci, chers catéchumènes de nous permettre de redonner un coup de jeune à notre foi de vieux baptisés. Avec vous, nous demandons à Notre Dame de Laghet qu’en cette nuit de Pâques, nous puissions accueillir la puissance de vie du Christ pour que nous devenions ces témoins désireux de ranimer l’amour dans le monde qui en a tant besoin.